Les jeunes, sujets et enjeux politiques (France, XXe siècle) - Sciences Po Accéder directement au contenu
N°Spécial De Revue/Special Issue Histoire@Politique : revue du Centre d'histoire de Sciences Po Année : 2008

Les jeunes, sujets et enjeux politiques (France, XXe siècle)

Résumé

Dans l’imaginaire social, l’alliage que forment « jeunesse » et « politique » ne va pas sans contradictions. Alors que « la jeunesse » est souvent associée au dynamisme, au progressisme, voire à la modernité — sans que ce dernier terme soit toujours fermement conceptualisé —, « les jeunes » suscitent de façon récurrente les inquiétudes des observateurs, lesquels vitupèrent leur prétendu manque d’intérêt pour la chose politique. Cette contradiction recoupe en partie la double polarité, désormais classique, qui oppose une jeunesse célébrée pour ses vertus et plus encore pour ses potentialités, et une jeunesse redoutée pour ses déviances et sa non-conformité. Dans leurs outrances mêmes, ces représentations disent assez combien « la jeunesse » apparaît en métaphore de ce qui la dépasse. Les espérances placées en elle comme les anxiétés qu’elle suscite sont les traductions symboliques de tendances plus vastes — normes et codes collectivement admis, projections dans l’avenir, peurs sociales… De fait, entre « jeunesse » et « jeunes », il n’y a pas que glissement sémantique : un fossé sociologique et politique s’y dit pour une part. La catégorie « jeunesse », érigée en entité sans égards pour son hétérogénéité, sert de support à bien des exaltations, déformations et instrumentalisations. Elle n’a parfois que peu à voir avec les jeunes individus que leur seul âge regroupe comme tels. La période contemporaine ne manque pas d’exemples de ces usages en miroirs déformants. Elle s’ouvre avec la Révolution française, grande pourvoyeuse de mythologie de la jeunesse, vénérée pour sa capacité supposée de régénération : la célébration, toute en discours, de la jeunesse, s’avère en fait utile pour assurer, en pratique, le pouvoir des aînés. Sous la monarchie constitutionnelle, le régime peut bien encenser la jeunesse, mais c’est pour mieux l’inciter à la passivité et à l’acceptation. Quant aux jeunes eux-mêmes, on les voit, souvent, aux premières loges du grand théâtre politique. La « Jeunesse des Écoles » sait battre le pavé. Sur les barricades, lors des « Trois Glorieuses », se retrouvent étudiants et ouvriers. Jeunes aussi, le plus souvent, les carbonari français et italiens ou les décabristes russes. Jeunes enfin, et par définition, les partisans de la Jeune Allemagne, de la Jeune Italie, de la Jeune Europe. Pour autant, aucune généralité n’est autorisée, et surtout pas l’équation par trop péremptoire jeunes = progressistes — par essence et comme par nécessité. Durant la Restauration, les jeunes manifestants royalistes ne font pas défaut pour soutenir Louis XVIII puis Charles X. En juin 1848, les plus jeunes se comptent moins nombreux parmi les insurgés qu’au sein des gardes mobiles venus les réprimer. Et durant l’Affaire, les jeunes anti-dreyfusards se montrent plus prompts à (se) manifester que leurs opposants, à telle enseigne que Zola, très amer, leur lance un « Où allez-vous, jeunes gens ? ». Ce dossier s’attache pour sa part au XXe siècle français, auquel une ouverture sur un exemple italien contemporain fait écho, en contrepoint. Composé de travaux d’historiens principalement mais non exclusivement, il entend éclairer trois des liens nouant « jeunesse » et « politique » : la socialisation politique des jeunes, les modalités pratiques de leur organisation, enfin les usages politiques de « la jeunesse »... Ludivine Bantigny

Domaines

Histoire
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03473697 , version 1 (09-12-2021)

Identifiants

Citer

Ludivine Bantigny, F. Osa. Les jeunes, sujets et enjeux politiques (France, XXe siècle). Ludivine Bantigny; Centre d'histoire de Sciences Po. Histoire@Politique : revue du Centre d'histoire de Sciences Po, 04, 2008. ⟨hal-03473697⟩
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