L'investissement des entreprises est-il efficace ?
Abstract
Depuis une dizaine d’années, l’investissement des entreprises est plus élevé en France que
dans la plupart des autres pays européens, que ce soit à l’échelle du périmètre large des
sociétés non fnancières ou à l’échelle plus restreinte du secteur manufacturier. Dans ce
dernier, les dépenses d’investissement représentent, en 2016, 25,7 % de la valeur ajoutée,
contre 19,0 % en Allemagne. Pourtant, nos performances économiques en matière de
compétitivité et de gains de productivité ne refètent pas cet effort. Ce décalage soulève de
nombreuses interrogations sur l’effcacité de l’investissement et les origines d’un possible
« paradoxe » de l’investissement français.
Pour tenter de lever ces interrogations, cette note s’intéresse au comportement agrégé d’investissement des entreprises françaises entre 1995 et 2016, et le compare à celui de leurs
homologues européennes en Allemagne, Espagne, Italie, Suède ainsi qu’aux Pays-Bas et
au Royaume-Uni. L’analyse de la ventilation de l’investissement par type d’actifs apporte
certains éléments de réponse.
Tout d’abord, les investissements en actifs immatériels comme la R&D, les logiciels et
bases de données sont très élevés en France, plus élevés que dans les autres pays européens étudiés, sans qu’il soit aujourd’hui possible de l’expliquer. L’investissement en
logiciels, en particulier, constitue une singularité française, au point d’expliquer à lui seul
une large part du taux élevé d’investissement des entreprises de notre pays. De plus, dans
une acception large des actifs immatériels, les entreprises françaises affchent également
des dépenses en publicité, en formation et en capital organisationnel plus élevées que celles de
la plupart des autres pays européens. Il reste à comprendre d’où provient cette particularité et pourquoi elle ne produit pas d’effets plus nets en matière de compétitivité. Ce premier
constat appelle des recherches complémentaires, notamment à partir des données d’entreprises. Il pourrait au moins en partie provenir d’un artefact comptable, lié à un manque
d’harmonisation des pratiques de comptabilité d’entreprise et nationale en Europe, malgré
des efforts importants en ce sens