Résumé : La réforme de la zone euro est à nouveau à l’ordre
du jour. Parmi les pistes envisagées, l’évolution des
règles budgétaires devrait figurer en tête de liste.
Celles-ci ont en effet engendré une austérité budgétaire
excessive pendant la crise, aggravant et prolongeant ses
conséquences économiques, sociales et politiques. Inversement, la réduction de la dette a été insuffisante dans
de nombreux pays en période de conjoncture favorable
dans les années 2000, les règles n’étant pas respectées
ou insuffisamment rigoureuses. Ces règles souffrent en
outre de graves problèmes de mesure : elles sont basées
sur un concept légitime, le solde public structurel, mais
celui-ci n’est pas observable et fait l’objet d’importantes
erreurs d’estimation.
Les erreurs de politique économique générées par les
règles budgétaires ont conduit à reporter sur la Banque
centrale européenne l’essentiel du rôle de stabilisation de
l’activité. L’application du cadre budgétaire européen extrêmement complexe, peu transparent et sujet à erreurs a,
par ailleurs, exposé la Commission européenne à des
critiques des États membres, que la situation de leurs
finances publiques soit solide ou dégradée. Les règles européennes, perçues comme du micro-management bruxellois
portant atteinte à la souveraineté nationale, servent ainsi
de bouc émissaire aux populistes antieuropéens.
Les règles budgétaires sont cependant indispensables
dans une union monétaire, afin d’assurer la soutenabilité de la dette publique et parce que la clause de nonrenflouement en cas de crise n’est pas crédible. Elles ne
sont pas une solution miracle et ne peuvent se substituer
au débat démocratique national sur les choix budgétaires
et la soutenabilité de la dette, mais elles devraient aider
à encadrer ce débat. Elles devraient être aussi transparentes et simples que possible en fixant des objectifs
directement pilotables par le gouvernement (simplification), permettre de conduire une politique budgétaire
contracyclique (stabilisation) et inciter à réduire la dette
publique excessive (soutenabilité).
L’objectif de cette Note est d’évaluer le cadre actuel et
de proposer une profonde simplification. Nous recommandons de substituer aux nombreuses règles actuelles une
règle simple : les dépenses nominales ne devraient pas
croître plus rapidement que le PIB potentiel à long terme et
plus lentement dans les pays où la dette est excessive. Les
simulations effectuées pour cette Note suggèrent qu’une
telle règle permettrait de concilier prudence budgétaire et
stabilisation macroéconomique de l’économie. Dans un
cadre institutionnel national et européen renforcé, nous
recommandons d’élargir le mandat du Haut Conseil des
finances publiques et de mieux l’intégrer dans le processus
budgétaire national en lui confiant l’analyse des prévisions budgétaires et de la soutenabilité de la dette et en
renforçant sa capacité à produire des prévisions macroéconomiques. Enfin, pour une application crédible et non
bureaucratique des règles budgétaires, nous préconisons
la combinaison de plusieurs instruments : surveillance,
incitations positives, discipline de marché et responsabilisation politique.