À la recherche de l’immatériel : comprendre l’investissement de l’industrie française - Sciences Po Accéder directement au contenu
Ouvrages Année : 2019

À la recherche de l’immatériel : comprendre l’investissement de l’industrie française

Résumé

Le taux d’investissement immatériel des entreprises manufacturières françaises, en particulier dans les logiciels et bases de données, est plus élevé que celui de leurs partenaires européennes, sans que cela ne se semble se traduire par un effet significatif sur leur compétitivité et leur productivité. Selon la comptabilité nationale, ce taux représente 6,3 % de la valeur ajoutée en 2017, pour les logiciels et bases de données, contre 1 % en Allemagne. La part de l’immatériel dans l’investissement total (formation brute de capital fixe hors construction) est également singulière : elle serait de 70 % en France, en 2015, contre 52 % en Allemagne. Une précédente note de la Fabrique, centrée sur l’efficacité de l’investissement, évoquait un « paradoxe » à expliquer. Nous détaillons dans ce document les raisons de cet écart, que nous chiffrons entre 6,7 et 8,5 milliards d’euros annuels de formation brute de capital fixe (FBCF), entre l’industrie française et la moyenne de ses homologues. Nous écartons les explications de nature sectorielle ou structurelle et montrons que cela découle principalement de pratiques de comptabilisation différentes entre les offices statistiques nationaux : l’immobilisation des logiciels et bases de données est bien plus importante dans les données françaises. Cette particularité se retrouve dans tous les secteurs manufacturiers mais elle est particulièrement prononcée pour la fabrication des produits informatiques, électroniques, optiques et électriques et la fabrication des matériels de transport. Ces deux secteurs concentrent 52 % de la FBCF en logiciels et 19,5 % de la valeur ajoutée manufacturière française. Plus de la moitié de la surévaluation estimée ci-dessus provient de ces deux secteurs (entre 55 % et 68 % selon les méthodes utilisées). Cela étant, malgré cet écart de nature comptable, les dépenses en logiciels et services informatiques – c’est-à-dire la somme de l’investissement et des consommations intermédiaires – demeurent comparativement élevées dans l’industrie française, relativement à la valeur ajoutée. Autrement dit, les intrants informatiques représentent un poids important dans la production en France. Il y a une part « réelle » de ce surinvestissement relatif dans les logiciels, que nous estimons à un peu plus de 2 milliards d’euros annuels. Mutatis mutandis, les données issues de la comptabilité des entreprises esquissent un tableau légèrement différent : elles reflètent elles aussi l’importance des actifs immatériels relativement à l’investissement total mais ne détectent pas l’accélération de l’accumulation du capital immatériel exprimée par les séries macroéconomiques. Les données d’entreprises révèlent en outre l’importante disparité de l’investissement immatériel. Ce dernier est très concentré au sein d’une poignée de gros investisseurs, ce qui peut expliquer la faiblesse des effets constatés sur la productivité agrégée. L’investisseur immatériel typique est une grande entreprise appartenant à un groupe, exportatrice et importatrice, et réalisant des investissements matériels élevés. Elle appartient souvent au secteur des transports ou des équipements électroniques et informatiques. Une telle hyperconcentration de l’investissement immatériel suggère que la transformation du tissu industriel vers l’industrie 4.0 n’en est encore qu’à ses débuts.
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Citer

Sarah Guillou, Caroline Mini, Philippe Varin. À la recherche de l’immatériel : comprendre l’investissement de l’industrie française. Presses des Mines; La Fabrique de l'industrie, pp.79, 2019. ⟨hal-03232264v1⟩
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