L’extraterritorialité du FATCA et le problème des "Américains Accidentels" - Sciences Po Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Journal du droit international (Clunet) Année : 2017

L’extraterritorialité du FATCA et le problème des "Américains Accidentels"

Résumé

As a result of several tax evasion scandals, the US Congress enacted in 2010 the Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), an extraterritorial statute imposing on all foreign financial institutions (FFIs) the obligation to report to the Internal Revenue Service (IRS) information about financial accounts held by US persons abroad. Since the direct transfer of data could be prohibited by foreign laws, the US concluded several bilateral agreements with other States (with France in 2014) so as to allow FFIs to collect and transfer the information required by FATCA. Within this framework, FFIs must identify US persons on the basis of several “US indicia”, among them a US place of birth. The US system of income taxation being one of the few based on nationality (citizenship-based taxation), FATCA has also targeted persons “accidentally” born in the US to non-US parents and also nationals and resident for tax purposes of other States. These “accidental Americans” have been suddenly confronted to Kafkaesque situations: some financial institutions refusing clients with US indicia, other requiring a certificate of loss of US nationality or full compliance with US tax and regulatory requirements. The combination of FATCA, citizenship-based taxation and the automatic acquisition of US nationality by virtue of jus soli have turned FATCA into an unprecedented extraterritorial apparatus directly hurting on a very large scale a significant number of persons no longer having any links with the US. This extraterritorial reach raises concerns from an international law perspective and FATCA also has other legal weaknesses. It raises indeed many issues as to its compatibility with the right to privacy and European standards on personal data protection. FATCA also generates discriminations based on nationality (true or alleged) that seem difficult to justify. While the implementation of FATCA could eventually be challenged before domestic courts, it also requires a broader response from French and EU authorities since the US does not apply bilateral agreements on a reciprocal basis.
À la suite de plusieurs scandales d'évasion fiscale, le Congrès américain a adopté en 2010 le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), législation extraterritoriale imposant à l'ensemble des institutions financières étrangères (IFE) de communiquer à l'administration fiscale américaine (l'IRS) des informations relatives aux comptes détenus à l'étranger par des personnes américaines. Le transfert de ces renseignements étant susceptible d'être prohibé par les droits nationaux, les États-Unis ont conclu des accords bilatéraux (avec la France en 2014) afin d'autoriser les institutions financières de les collecter et communiquer. Les IFEs doivent depuis identifier les personnes américaines sur la base « d'indices d'américanité », dont le lieu de naissance aux États-Unis. Le système fiscal américain étant l'un des seuls où les revenus mondiaux sont taxés sur le fondement de la nationalité (citizenship-based taxation), le FATCA a ainsi ciblé des personnes nées « par accident » aux États-Unis, de parents étrangers, et qui sont nationaux et résidents fiscaux d'autres États. Ces « américains accidentels » ont été subitement confrontés à des situations kafkaïennes, certaines institutions financières refusant des clients présentant des indices d'américanité, d'autres exigeant que ces personnes se mettent en conformité avec leurs obligations réglementaires et fiscales au regard du droit américain ou prouvent qu'elles ne sont pas américaines. La combinaison du FATCA, de la citizenship-based taxation et d’un droit du sol pour ce qui concerne l’acquisition automatique de la nationalité américaine ont ainsi fait du FATCA un dispositif à portée extraterritoriale sans précédent qui affecte directement et sur une très large échelle un nombre significatif de personnes qui n’ont plus de lien avec les Etats-Unis. Cette extraterritorialité soulève des interrogations du point de vue du droit international et il apparait aussi que le FATCA est un dispositif juridiquement fragile. Il soulève en effet de sérieuses interrogations quant à sa compatibilité avec le droit à la vie privée et le droit européen de la protection des données personnelles. Il génère par ailleurs des discriminations fondées sur la nationalité vraie ou supposée difficilement justifiables. Si la mise en œuvre de ce dispositif est susceptible d’être contestée devant les juridictions par les personnes affectées, il appelle néanmoins, une réaction plus large de la part de la part des autorités françaises et de l’UE, en particulier lorsque l’on constate que les accords bilatéraux ne sont pas appliqués de manière réciproque par les Etats-Unis.

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hal-03230108 , version 1 (25-08-2022)

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Citer

Régis Bismuth. L’extraterritorialité du FATCA et le problème des "Américains Accidentels". Journal du droit international (Clunet), 2017, 144 (4), pp.1197-1261. ⟨hal-03230108⟩
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