Quand « le capteur leur donne la parole » : la (difficile) représentation des usagers par le big data dans l’aménagement urbain
Abstract
Cet article explore les coulisses d’une expérimentation menée au cours du projet de
réaménagement de la Place de la Nation à Paris pour représenter les usagers par le biais de
big data. Au travers de l’installation de différents capteurs en amont et en aval du
réaménagement, la mairie de Paris se saisit de l’expérimentation proposée par l’entreprise
Cisco pour mieux connaître les usages de l’espace public, jugés imparfaitement représentés
dans les dispositifs de participation traditionnels. Toutefois, les données collectées ne seront
jamais utilisées par les équipes en charge du réaménagement de la place. Cet article analyse
ce contraste entre les promesses du big data et le non-usage des données pour comprendre
pourquoi ce nouveau mode de quantification n’est pas parvenu à s’imposer comme un
instrument de représentation au service de l’aménagement urbain. Le récit de la mise en
œuvre de l’expérimentation souligne que le succès du big data ne tient pas exclusivement à
sa plus ou moins grande capacité à rendre compte du réel mais également aux conditions
sociales qui président à l’émergence, au développement et à l’utilisation de ces technologies
quantitatives de représentation. Il souligne aussi l’apport (et les limites) du recours à
l’expérimentation pour susciter l’interaction entre producteurs et utilisateurs des données.