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Chapitre D'ouvrage Année : 2011

Introduction - Institutions économiques et institutions marchandes. Nature, puissance et genèse

Résumé

Les activités économiques sont à ce point cruciales aux yeux du monde moderne qu’une science spécifique leur est dédiée depuis plus de deux cents ans. Les sociologues, comme des spécialistes d’autres sciences sociales (historiens et anthropologues au premier chef), se sont néanmoins convaincus qu’elles étaient une chose trop importante pour être laissées aux seuls économistes : ainsi en ont-ils fait l’un de leur champ privilégié d’investigation (Dobbin, 2004 ; Steiner, 2007 ; Swedberg, 2003). Au risque d’être excessivement schématique, l’on peut distribuer leurs efforts autour de deux propositions principales. La première défend l’idée que pour comprendre les activités économiques, il faut tenir compte des relations que les acteurs économiques entretiennent entre eux. Formulée dans un article pionnier de M. S. Granovetter (1985), cette intuition fort simple a pu recevoir des développements très divers : pour certains, il s’agissait de montrer comment les relations informelles, amicales, familiales pèsent sur la vie économique (Granovetter, 1974), ou comment elles contribuent à produire de la confiance (Granovetter, 1985 ; Uzzi, 1996) ; pour d’autres, il faut se donner les moyens – méthodologiques, notamment – de repérer les formes des réseaux qui donnent leurs formes aux marchés ou aux organisations (White, 1981 ; Baker, 1984 ; Lazega, 1992) ; pour d’autres encore, cette forme ne fait pas de mystère : c’est celle d’un champ, mais il faut travailler à en repérer les acteurs, à décrire les règles qui le régentent, à analyser ses transformations (Bourdieu, 1997 et 2000 ; Fligstein, 1996 et 2001b). Nous avons suggéré nous-même de regarder ces interrogations relatives aux acteurs économiques et à la nature des relations qu’ils entretiennent comme relevant d’une attention à la morphologie des activités économiques (François, 2008). La seconde direction qu’a empruntée la nouvelle sociologie économique s’appuie elle aussi sur une autre intuition élémentaire : dans leurs pratiques économiques, les acteurs sont certes mus par leurs intérêts, ils sont certes outillés d’une capacité de calcul et d’optimisation, mais pour définir ces intérêts, pour rendre possibles ces calculs, pour agir en un mot, les acteurs économiques s’appuient sur un ensemble de règles, de normes, de routines, de traditions, de pratiques établies, ils mobilisent un ensemble d’institutions. Là encore, l’attention portée aux institutions a pu prendre des formes extrêmement diverses : là où certains s’intéressent à l’encadrement juridique des activités économiques et la mise en place, par l’État, des conditions de possibilité du développement des marchés (Stanziani, 2003 et 2005 ; Dobbin, 1994 ; Fligstein, 1996 et 2001b), des organisations (Fligstein, 1990) ou des professions (Abbott, 1988 et 2003), d’autres soulignent l’importance des conventions ou des dispositifs qui rendent possibles les échanges marchands en situation d’incertitude (Eymard-Duvernay, 1989 ; Eymard-Duvernay et Marchal, 1997 ; Karpik, 1996 et 2007), quand d’autres encore insistent sur les phénomènes de légitimité et de hiérarchie symboliques qui peuvent être attachés, selon les cas, aux catégorisations marchandes (Podolny, 1993 et 2005), aux formes organisationnelles (Meyer et Rowan, 1977 ; DiMaggio et Powell, 1983) ou aux identités professionnelles (Rao et al., 2003). C’est dans cet ensemble de travaux, plus particulièrement sensibles à la dimension institutionnelle des activités économiques, que s’inscrit le présent ouvrage. [deux premiers paragraphes]

Domaines

Sociologie
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02445660 , version 1 (20-01-2020)

Identifiants

Citer

Sophie Dubuisson-Quellier, Pierre Francois. Introduction - Institutions économiques et institutions marchandes. Nature, puissance et genèse. Pierre François; Pierre François. Vie et mort des institutions marchandes, Presses de Sciences Po, pp.11 - 38, 2011, 9782724611878. ⟨hal-02445660⟩
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